LA MAZURKA DE L'ESPOIR - Pascale Delacourt-Stelmasinski
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PROLOGUE
La Pologne n'existe plus !
Comment ce pays à l'âme fière et généreuse a-t-il pu être rayé de la carte de l'Europe ?
Le 1er juillet 1569, sous le règne de Sigismond II Auguste Jagellon, le royaume de Pologne signa un accord "l'union de Lublin" avec le grand-duché de Lituanie.
Cette "république des deux-nations" devint fédérale aristocratique. En effet, la noblesse polonaise représentait dix pour cent de la population. L'entente forma ainsi le plus vaste territoire d'Europe.
La création de cet Etat permit à la Pologne et à la Lituanie de se développer surtout dans le domaine de l'agriculture.
Le Parlement ou la Diète polonaise, appelée "sejm", dirigea cette alliance.
Le 7 juillet 1572, le roi mourut sans laisser d'héritier. Quarante mille nobles se réunirent afin d’adopter une loi selon laquelle le monarque ne serait plus héréditaire mais élu.
Entre 1652 et 1791, une règle d'unanimité de vote autorisa chaque député du "sejm" à forcer un arrêt immédiat de la session en cours en criant "nie pozwalam" Il exerçait le "liberum veto". Il pouvait ainsi rendre nulle une résolution. Les pays voisins, qui convoitaient la Pologne, en profitèrent pour s'immiscer dans les affaires internes de l'union, en achetant les voix des membres de la Diète afin d'imposer leur loi.
Sept rois se succédèrent avant l'élection, le 21 juin 1674, de Jean III Sobieski. Il fut sacré le 2 février 1676, en la cathédrale du Wawel à Cracovie.
Il souhaitait débarrasser les pays chrétiens de la présence de l'Empire turc qui s'implantait dangereusement dans le sud-est de l'Europe. Aussi, le 12 septembre 1683, à la tête de 81 000 hommes, il chassa définitivement l'armée ottomane, composée de 130 000 soldats, conduite par Kara Mustafa qui menait le siège de Vienne en Autriche. Il devint un héros national.
En 1755, un jeune homme, Stanislas Auguste Poniatowski, fils du castellan de Cracovie, Stanislas Poniatowski et de Konstancja Czartoryska, fit la connaissance de Charles Hamburg Williams, diplomate et écrivain. Il devint son ami.
Grâce à ses liens familiaux avec la famille princière Czartoryski, il fut envoyé à Saint-Pétersbourg, en 1755, au service de Williams qui venait d'être nommé ambassadeur de Grande-Bretagne en Russie.
Lors d'un bal, Stanislas Poniatowski rencontra une charmante jeune fille, Sophie Frédérique Augusta d'Anhalt-Zerbst, princesse allemande protestante convertie à la religion orthodoxe sous le nom de Catherine Alexeievna. Âgée de 25 ans, elle était mariée depuis 1745 au futur tsar de Russie dont la tante, la tsarine Elisabeth 1ère, régnait toujours.
Ils tombèrent éperdument amoureux l'un de l'autre. Stanislas quitta la Russie en juillet 1756 mais y revint, un an plus tard, comme ambassadeur de Saxe.
Le 6 juillet 1758, l’époux de Catherine Alexeievna surprit les amants en flagrant délit d'adultère. Stanislas Poniatowski dut regagner précipitamment la Pologne.
Le 5 janvier 1762, Elisabeth 1ère rendit l’âme et le mari de Catherine devint le tsar Pierre III Romanov.
A la mort de Pierre III, le 9 juillet 1762, Catherine monta sur le trône de Russie sous le nom de Catherine II, la Grande Catherine.
L'impératrice Catherine II soutint l'élection de Stanislas Poniatowski pour la succession au trône de Pologne.
Le 7 septembre 1764, à l'âge de trente-deux ans, il fut élu roi de la « république des deux-nations » et couronné le 25 novembre 1764, le jour de la Sainte-Catherine, à Varsovie.
Au début de son règne, le nouveau roi tenta d'introduire quelques réformes. En octobre 1766, il essaya de restreindre la politique du "liberum veto", mais sans succès, car la Prusse, l'Autriche et la Russie préféraient que la Pologne restât un Etat faible.
Le premier partage de la Pologne eut lieu en 1772. Le roi de Prusse, Frédéric II, la tsarine Catherine II et l'archiduchesse d'Autriche Marie-Thérèse se mirent d'accord pour ôter à la Pologne un tiers de son territoire. Stanislas ne put s'y opposer.
Le 29 mars 1790, la Pologne-Lituanie et la Prusse signèrent un traité d'alliance et d'amitié. Malheureusement, il donna une fausse joie à la Pologne qui croyait avoir trouvé une alliée capable de la protéger pendant la période de changements qu'elle envisageait.
Suite à la guerre russo-polonaise de 1792, le deuxième partage de la Pologne fut proclamé en 1793 entre l'empire russe et le royaume de Prusse.
Le peuple commença à se révolter voyant son pays partir à vau-l'eau. Le roi Stanislas Poniatowski essaya de sauver ce qui pouvait encore l'être. En 1794, Tadeusz Kosciuszko, aristocrate et officier polonais qui avait participé à la guerre d'indépendance des Etats-Unis prit le commandement militaire de l'insurrection. Il obligea les Russes à évacuer Varsovie et Vilnius.
Les Autrichiens accoururent au secours de l'armée de la tsarine qui peinait devant la fougue de Kosciuszko.
Catherine II ordonna à ses soldats de contrer cette rébellion et d'attaquer Cracovie. Kosciuszko parvint tout de même à battre l'ennemi plus nombreux et mieux équipé.
Les Prussiens vinrent aussi à la rescousse des russes. Les Polonais résistèrent. Mais le 10 octobre 1795, lors de la bataille de Maciejowice, Kosciuszko fut blessé, emmené à Saint-Pétersbourg et emprisonné dans la forteresse Pierre-et-Paul.
La révolte continua, malgré tout. Le 4 novembre, Alexandre Souvorov, commandant d'un corps de bataille composé de 11 000 hommes, ordonna l'assaut. Les militaires polonais furent tués ou faits prisonniers. Les Russes pillèrent et brûlèrent Varsovie. Souvorov laissa ses soldats massacrer 20 000 habitants du faubourg de Praga situé à l'est de Varsovie.
Après le décès de Catherine II, le 17 novembre 1796, son fils, le nouveau tsar Paul 1er décida de gracier et de libérer Kosciuszko.
En 1795, eut lieu le troisième partage de la Pologne, entre la Russie, l'Autriche et la Prusse, de la façon suivante :
L'Autriche-Hongrie s'installa dans l'ouest de la Galicie et le sud de la Mazovie avec les villes de Cracovie et de Lublin.
La Prusse prit la Podlachie, le reste de la Mazovie et Varsovie.
La Russie, enfin, se réserva La Courlande, la Lituanie et une partie de la Volhynie avec Vilnius.
Le neveu du roi, le prince Joseph Poniatowski, qui avait participé au soulèvement de Kościuszko en tant que simple soldat, écrivit à son oncle une phrase pleine de tristesse et de désillusion : "Si Votre Majesté eût, au début de cette campagne si insuffisamment préparée au point de vue militaire, fait appel au pays entier, si elle fût montée à cheval à la tête de la noblesse, si elle eût armé les villes, émancipé les paysans, ou nous aurions péri avec honneur, ou la Pologne aurait repris son rang de grande puissance."
Le vingt-quatre octobre 1795, la Pologne disparut officiellement pour une durée de cent vingt-trois ans.
Après ce dernier partage, le roi Stanislas Poniatowski signa son abdication, le vingt-cinq novembre 1795, jour de la Sainte-Catherine. Il fut le dernier roi de l'union du Royaume de Pologne et du grand-duché de Lituanie. Il s'exila à Saint-Pétersbourg et y décéda d'un accident vasculaire cérébral le 12 février 1798. Le tsar Paul 1er lui offrit un enterrement royal.
Bonaparte essaya de ressusciter l'Etat polonais. Il créa le duché de Varsovie en 1807. Mais celui-ci disparut après la retraite de Russie, en 1813.
Lors de la première guerre mondiale, la Pologne était toujours partagée entre les trois empires. Les Polonais durent se mobiliser dans les armées autrichienne, russe et allemande.
La Pologne renaîtra le 11 novembre 1918 !